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Gaza, 1956 le constat du général Moshe Dayan.

By 30 mars 2024 2 Comments

1956, Vision prémonitoire du « héros israélien », le général Moshe Dayan.

 

A l’occasion des obsèques de l’officier Roy Rotenberg, tué à la frontière entre Israël et Gaza Moshé Dayan fait un discours … prémonitoire. Il constate le cercle vicieux, le mécanisme du rejet et sa condamnation à la guerre permanente.

Ne blâmons pas ces meurtriers aujourd’hui. Que pouvons-nous dire à l’encontre de leur haine terrible envers nous ? Depuis huit ans maintenant, ils restent dans le camp de réfugiés de Gaza et nous voient transformer sous leurs yeux leur terre et leurs villages, où leurs ancêtres et eux-mêmes résidaient auparavant, pour en faire notre foyer.

 

Ce n’est pas parmi les Arabes de Gaza, mais en notre sein à nous que nous devons chercher la source du sang de Roy. Comment avons-nous pu fermer les yeux, refuser de regarder notre destin en face et de voir le sort de notre génération dans toute sa brutalité ?

 

Aujourd’hui, soyons lucides sur nous-même. Nous sommes une génération de colonisation, et sans le casque en acier et le canon de notre fusil, nous ne serons pas en mesure de planter un arbre ou de construire une maison.

 

Ne craignons pas de regarder en face la haine qui consume et remplit les vies de centaines d’arabes qui vivent autour de nous. C’est le sort de notre génération. C’est notre choix – être prêts et armés, coriaces et durs – sans quoi l’épée nous échappera des mains et nos vies seront tranchées net.”

Huit ans plus tôt, en 1948, à Lod (Lydda) Moshe Dayan avait lui-même dopé le mécanisme du Rejet.  

En juillet 1948, dans le but de conquérir les villes de Lydda et Ramleh, les Israéliens lancent l’opération « Dani ». Moshe Dayan dirige le 89e Bataillon. Il part à l’assaut de de Lydda avec un véhicule blindé géant monté avec un canon, et des jeeps équipées de mitrailleuses. Il traverse la ville en mitraillant tout ce qui bouge.

En quelques heures, les soldats occupent des postes clés dans le centre-ville et enferment des milliers de civils palestiniens dans la Grande Mosquée et l’église Saint Georges.

 

Pour Benny Morris [1] : « des Palmachniks nerveux massacrent des détenus dans le complexe de la mosquée ».

Selon Yoav Gelber[2], ce fut un « massacre plus sanglant que Deir Yassin ».

Alon Kadish et Avraham Sela[3] écrivent que ce fut « une bataille intense où la démarcation entre civils, combattants irréguliers et unités de l’armée régulières n’existait pas »

Walid Khalidi [4] parle d’une « orgie de tuerie sans discrimination ».

Soixante-dix mille palestiniens sont expulsés de chez eux.

 

 

Lydda, la boîte noire du sionisme

Pour Ari Shavit[5], auteur israélien de « Ma terre promise »[6] :

« La vérité est que le sionisme ne pouvait supporter la ville arabe de Lydda. Dès le début, il y avait une contradiction substantielle entre le sionisme et Lydda. Si le sionisme devait exister, Lydda ne pourrait pas exister. Si Lydda devait exister, le sionisme ne pourrait pas exister. Rétrospectivement, c’est vraiment très clair. »

Le colonialisme aveugle au cœur du Sionisme

Ariel Shavit poursuit son analyse :

Lorsque Siegfried Lehmann arriva dans la vallée de Lydda, en 1927, il aurait dû voir que si un État juif devait exister en Palestine, une Lydda arabe ne pourrait pas exister en son centre. Il aurait dû savoir que Lydda était un obstacle qui bloquait la route vers un État juif, et qu’un jour le sionisme devrait l’enlever. Mais le docteur Lehmann n’a pas vu, et le sionisme a choisi de ne pas le savoir. Pendant des décennies, les Juifs ont réussi à se dissimuler la contradiction entre leur mouvement national et Lydda. Pendant quarante-cinq ans, le sionisme a prétendu être l’usine d’Atid, les oliveraies et le jeune village de Ben Shemen vivant en paix avec Lydda. Puis, en trois jours dans l’été cataclysmique de 1948, Lydda n’était plus. »

 

Qu’est-ce qui a changé depuis 1948 ?

A part d’avoir trouvé le bouc-émissaire « La politique de Netanyahou », rien n’a changé.

Au contraire, avec un processus identique « massacrer, terroriser, expulser », c’est la magnitude de la colonisation qui s’est amplifiée.

La vision prémonitoire bientôt septuagénaire de Moshe Dayan se poursuit irrésistiblement. Dès 1956, il constate les effets néfastes de la colonisation. Avec des mots forts (casque, épée…) il confirme la nécessité de se battre. C’est une sorte d’auto condamnation à la guerre. Son erreur de leader, est d’avoir limité cette auto condamnation à UNE GÉNÉRATION.
Force est de constater que 3 générations plus tard, sans renoncement au sionisme et sans ambition à devenir citoyen de la région, Israël se condamne à la vision Dayan.

Pendant les travaux du génocide, la carte de victimisation agit.

Cette sorte de sauf-conduit devient obsolète, et contre-productive.

  • Les Palestiniens sont en voie de disparition.

  • Les juifs se mettent en danger.

 

Où en est-on aujourd’hui ?

Le discours de Moshé Dayan n’aboutissait pas à une reconnaissance de l’autre, du Palestinien. Il aboutissait à la nécessité de s’armer et de combattre sans limite définie, sans horizon, sans ambition d’intégration dans le monde où il est.

L’impasse est là et reste là depuis 1948.

Dans la logique de la pensée de Moshe Daya, Israël guerroie et envahit Gaza sans autre idée que de se venger, tuer, expulser, éradiquer, coloniser.

Rien d’autre.

Bilan civil.

En six mois de guerre, Israël a tué plus de 32000 civils dont 12 000 enfants, plus de 500 médecins et personnels de soins, 143 journalistes, près de 100 doyens et professeurs d’universités, des centaines de personnels municipaux et du maintien de l’ordre. Il a détruit toutes les infrastructures civiles (Hôpitaux, écoles, centres sociaux, lieux de prière, logistiques de l’eau, de l’électricité et des télécommunications).

De surcroît, des actes criminels notés par la Cour Internationale de Justice,

  • Expulsion de centaines de milliers de Palestiniens, du nord vers le sud de la bande de Gaza.

  • Blocage de toute aide humanitaire, mise de la population en danger de génocide (déshydratation, famine et manque de soin)

  • Meurtre de toute personne qui tente de revenir au Nord, là où il n’a plus rien. Gaza Nord est rasé à plus de 70%.

Bilan militaire, image mondiale d’Israël, impact sur les juifs du monde.

Le bilan militaire israélien montre un échec total : des otages israéliens sont encore détenus, la résistance palestinienne reste active, l’organisation politique du Hamas voyage et négocie.

Cette nième « guerre » acte la caducité du sionisme et le début de sa fin programmée à sa naissance.

 

D’un soutien occidental quasi inconditionnel pour Israël, sous la pression des peuples, ce monde bascule. Un mouvement de fond émerge contre le sionisme. Israël est en passe d’être mis au ban des nations. De surcroît, l’amalgame sionisme & judaïsme activé par les idéologues sionistes est repris par les masses.

Il est repris à l’envers.

Le racisme anti juif en est dopé.

Allons-nous assister sans ciller à :

  • L’éradication du Peuple Palestinien,

  • L’autodestruction de l’humanité juive par le sionisme,

  • La mise en danger des juifs dans le monde,

  • La complicité, technologie et armement, des entreprises occidentales avec un projet raciste et d’apartheid, voire génocidaire,

  • Le soutien à ce projet criminel par l’importation et la consommation de produits israéliens,

  • L’impotence de l’ONU,

Est-ce que le drapeau Israélien flottera aux JO Paris le 26 juillet prochain ?

 

Prochainement le livre :

Adel Paul Boulad,

Consultant international Diversité & Performance

[1] Morris, Benny (1986), “Operation Dani and the Palestinian Exodus from Lydda and Ramle in 1948” [archive], Middle East Journal, Vol 40, issue 1, p. 82-109.

[2] Gelber, Yoav (2006), Palestine, 1948: war, escape and the emergence of the Palestinian refugee problem. Sussex University Press. (ISBN 1902210670), 9781902210674

[3] Kadish, Alon, and Sela, Avraham (2005), Myths and historiography of the 1948 Palestine War revisited: the case of Lydda, The Middle East Journal, September 2005.

[4] Walid Khalidi est né en 1925 à Jérusalem. Diplômé de l’université d’Oxford, Walid il a enseigné l’histoire à Oxford, Beyrouth et Harvard. Il est le secrétaire général de l’Institut des études palestiniennes depuis sa fondation en 1963.

En 2012, Actes Sud / Sindbad a publié Nakba 1947-1948.

[5] Ari Shavit, Lydda 1948, A city, a massacre, and the middle East today in the New-Yorker. 21/10/2013.

[6] Edition J-C Lattés. 2 septembre 2015. Essai (broché)

2 Comments

  • Bonnat Pierre-Jean dit :

    Le drapeau israélien aux JO ? Voilà une vraie question. Merci de la poser.

    • A.P. boulad dit :

      C’est une des 24 préconisations en cours de coordination.
      La présence de ce drapeau ne laissera pas indifférent.
      En effet, c’est par millions que l’occident manifeste sa réprobation de la colonisation israélienne et du nettoyage ethnique en cours.

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