Cher monsieur Thréard,

La une du Figaro du 20/04/2024 expose une photo, celle d’un petit groupe de manifestantes iraniennes rassemblées par les Gardiens de la Révolution. Cette photo invite à lire en pages 2-3 un long développement sur le « conflit Israël – Iran ». La photo et le développement m’ont intrigué à propos de l’intégrité journalistique.

Par la présente, permettez-moi de partager avec vous mon questionnement.

En effet, ce faisant, Le Figaro rejoint les autres médias à propos du théâtre international hollywoodien Iran – Israël. Ce théâtre d’un coût proche du milliard de dollars opère une double occultation :

1. Le nettoyage ethnique en cours en Palestine,

2. Les manifestations occidentales massives en soutien au Peuple Palestinien,

Ce focus visuel sur des femmes « bâchées » de haut en bas détourne de l’essentiel les regards de vos lecteurs.

Comment se fait-il que votre journal adopte une telle ligne médiatique ?

Comment pouvez justifier de cacher le soulèvement porté par des millions de manifestantes et manifestants dans les grandes capitales et villes occidentales ?

Réf ci-dessus, face à la misérable escouade iranienne « bâchée », vos lecteurs pourraient découvrir les milliers de drapeaux palestiniens et les banderoles brandis par des occidentales vêtues comme vos lectrices. Grâce à vous, elles verraient leurs consœurs en tenues printanières dans l’hémisphère Nord, et automnales par météo clémente en Australie, Nouvelle-Zélande, etc.

Pour la Nouvelle-Zélande, vous avez même le privilège d’un HAKA FOR GAZA.

 La faillite médiatique vue par le cartésianisme français

La page de ce 20/04/ 2024 et d’autres s’empilent dans la catégorie des faillites médiatiques. Elles sont analysées et décortiquées par vos confrères de BLAST[1]. Leur première émission s’intitule : “Israël-Palestine – un naufrage médiatique sans précédent”.

Les quelques minutes[2] d’extraits [3] de cette analyse méritent votre attention.

La faillite médiatique vue par le style humoristique égyptien

Pendant la présidence égyptienne de Mohamed Morsi, les Frères Musulmans au pouvoir, chaque vendredi soir, comme des millions d’égyptiens je m’installais face à la TV. C’était l’émission hebdomadaire du chirurgien devenu humoriste, Bassem Youssef. Les éclats de rire résonnaient dans le quartier. A l’avènement du Président Sissi, la rigueur autoritaire et le cadrage médiatique poussent l’humoriste nationale à son émigration aux USA. Très vite populaire dans le monde anglo-saxon, il mène désormais un nouveau combat. Il dénonce l’effondrement médiatique occidental à propos de la tragédie Palestinienne. Il dénonce le manque de transparence, la malhonnêteté et le manque d’intégrité des médias.

Dans son style humoristique désormais mondialement célèbre il aide au discernement. Dans la vidéo ci-après, il y pointe les expressions clés. Elles font partie de ce qu’il appelle Gish Galopping, une technique de déviation de l’attention. Votre une du 20 avril dernier en est un exemple.

Cette courte vidéo mérite aussi votre attention !

Cliquer ici

Que se passe-t-il depuis 75 ans derrière le paravent médiatique occidental ?

1^ère étape. A sa naissance en fin du 19^ème siècle, le sionisme était une réponse territoriale au racisme anti-juif européen. Le « sionisme territorial » s’installe dans des zones sans peuple, au Kenya et en Argentine

2^ème étape. A partir de 1917, à la suite de la Déclaration Balfour, de facto le « territorial » appliqué en Palestine devient colonial. Il y avait des autochtones !  Ronald Storrs organise la colonisation juive comme il l’avait fait pour les Anglais en Irlande du Nord, l’Ulster. Sa politique se résume dans sa déclaration : « establish in Palestine a little loyal jewish Ulster ». En quinze ans, il fait passer la population juive en Palestine de 6 à 35%.

J’en décrit les détails et les mécanismes en page 85-90 de mon livre « Palestine. Fin du mécanisme du rejet. Chroniques d’un militant en vue d’un nouvel horizon ».

3^ème étape. Avec les révélations du Commandement N° 40 dicté le 25 novembre 1948 par David Ben Gourion, et son aveu lors d’un interview en 1956, sionisme et fascisme deviennent synonymes.

J’en donne les éléments et les références documentaires dans ma chronique publiée le 19 avril dernier, cliquer ici.

Le commandement N°40 n’est pas abrogé, il court depuis bientôt 76 ans. Sa phase avancée a lieu devant en direct à Gaza. Le nettoyage ethnique que d’autres appellent génocide, se déroule.

La perversion du paravent médiatique « Netanyahou, le Likoud, l’extrême droite … »

Le tollé est général contre Netanyahou et ses alliés au pouvoir. Cela laisse sous-entendre qu’un changement de régime changerait tout. Force est de constater que non.

D’autres journalistes que ceux du Figaro sont sur place. Ils témoignent et filment la fascisation de la société israélienne. Le parti de la Paix a disparu. Les députés qui osent questionner ou critiquer sont expulsés de la Knesset. Les juifs africains subissent un racisme sans précédent.

Abigail Suzanne Martin, connue comme Abby Martin en parle. Abby est une journaliste américaine, présentatrice de télévision et militante. Elle a aidé à fonder le site Web de journalisme citoyen Media Roots et siège au conseil d’administration de la Media Freedom Foundation qui gère Project Censored.

Son interview par Ash Sarkar mérite aussi votre attention. Cliquer ici

 

Vos journalistes attendent-ils votre feu vert pour aller sur place ?

Lors de son interview BFM TV, Ofer Bronchtein conseiller auprès du Président Macron déclare à propos de Gaza « laisser le temps au temps ». Des leaders d’opinion, à ma question comment voyez-vous la suite m’ont dit froidement et cyniquement « Il faut que Dresde se passe »

Sur les 26 milliards $ accordés ce 21 avril 2024 par les USA à Israël, neuf sont destinés à l’humanitaire gérés par …. Israël.

 

Où sont vos journalistes ?

Cette aide « humanitaire » serait-elle destinée à autre chose que rendre les Palestiniens présentables au dispatch de déportation en planification. L’opération est prévue par voie maritime depuis le nouveau port « provisoire » de Gaza.

Rappelons-nous. Ce port comme l’aéroport étaient prévus dans le cadre des accords d’Oslo. Saboté par Israël ces deux projets n’ont jamais vu le jour. Aujourd’hui, à grande vitesse le port prend forme. Il est en cours d’installation devant l’ex-quartier El Chati et l’ex-camp de réfugiés Jabaliya terrassé depuis début octobre.

Où sont vos journalistes ?

Pour « finir avec Hamas », Tsahal prépare son opération à Rafah et Khan Younés. Cela se déroulera avec les inévitables « dégâts collatéraux ». La pression maximum sur les survivants Palestiniens les poussera vers la zone de dispatch “hors Palestine” en cours de mise en place. Après le nettoyage ethnique, la déportation.

Cette nième usurpation criminelle ne mériterait-elle pas la une du Figaro ?

Bien à vous

Adel Paul Boulad, Consultant international Diversité & Performance

 

 

 

 

[1] Pour sa première Blast en partenariat avec Acrimed (Action-CRItique-MEDias), dit « Quatrième pouvoir » a produit cette vidéo.

[2] Le Plan de la vidéo. 0:00 : Introduction de 4e pouvoir. 5:50 : Préambule : présentisme et dépolitisation. 11:29 : « Tout a commencé le 7 octobre ». 14:00 : « La riposte d’Israël ». 15:32 : « Guerre Israël-Hamas ». 18:57 : Propagande médiatique israélienne. 28:21 : Doubles standards, compassion sélective, invisibilisation. 45:24 : Le journalisme politique.  Conclusion

[3] Vidéo complète sur https://www.youtube.com/watch?v=e5WwkBARVPA